Dès la naissance des industries de l’audiovisuel, des noms qui résonnent encore aujourd’hui, Daguerre, Gaveau, Pathé, Lumière, lièrent durablement l'histoire à celle de l’Est parisien.
L’attrait d’espaces encore libres et verts aux portes de la Capitale, un réseau de transports rapidement développés (omnibus hippomobile, trains, tramways) reliant les quartiers artistes de Paris et le territoire, attirèrent très tôt le monde du spectacle parisien vers les communes bordant la Marne et le bois de Vincennes.
Les Pionniers
En 1840, Louis Daguerre acheta un domaine à Bry-sur-Marne. Peintre et décorateur de théâtre, il était réputé depuis 1822 pour son diorama, spectacle théâtral reposant sur des jeux d’éclairages qui donnait vie à de grands tableaux peints en trompe-l’œil. Un an auparavant, il avait lancé la vente de son daguerréotype, premier procédé de reproduction de l’image commercialisé, que Daguerre avait développé à partir des premières recherches de Nicéphore Niepce. En 1842, il réalisera un diorama dans l'église de sa ville d'adoption, l’église Saint-Gervais-Saint-Protais. Il s'y trouve toujours et est aujourd’hui le dernier exemple subsistant de cette ancienne technique spectaculaire.
Alfred Grévin avait lui, en 1867, choisi de s’installer à Saint-Mandé. D’abord sculpteur et caricaturiste, c’est le musée de cire qu’il créa en 1882 à Paris qui le rendit célèbre. Entre 1885 et 1888, le Cabinet fantastique du musée avait vu les débuts du magicien Georges Méliès. En 1892, il accueillit la Pantomime Lumineuse d’Emile Reynaud, qui y fit la première projection publique d’un dessin animé de l’histoire.
D’ailleurs, en 1894, Reynaud, artiste et inventeur, cherchant à améliorer son photo-scénographe, l’appareil de prises de vues animées qu’il était en train de concevoir, était venu le tester à Saint-Maur-des-Fossés, en face du passage à niveau de la gare de Champigny.
Les Industriels
Le temps de l’industrialisation suivit rapidement celui des pionniers.
L'image
L’industrie photographique arriva d’abord, avec François Graffe et Joseph Jougla au Perreux, alors quartier de Nogent. Dès 1882, un an à peine après que George Eastman ait lancé à Rochester dans l'état de New-York sa production de plaques photographiques sèches, ils y implantèrent leur propre manufacture de supports photographiques. Puis Jougla, resté seul, bâtit vers 1900 une grande usine sur la plaine de Polangis à Joinville-le-Pont. Il y produisit notamment les Omnicolores, premières plaques couleurs au monde et emploiera jusqu’à 600 personnes après sa fusion avec l’entreprise des frères Lumière.
En 1897, c’est à Saint-Maur-des-Fossés que la famille Grieshaber implante son usine de supports photographiques, exploitant la marque de « l’As de Trèfle » originellement créée par Graffe et Jougla. Propriété ensuite du groupe Essilor, les installations de Saint-Maur fonctionnèrent jusqu’à la fermeture de l’usine en 2013.
Le Cinéma
L'image animée suivit de près l'image fixe. Dès 1896, Charles Pathé implanta ses premières installations à Vincennes. En quelques années, il fit de la ville la première capitale mondiale du cinéma !
Les studios de Vincennes puis de Montreuil et Joinville-le-Pont et les rues des villes elles-mêmes, virent des centaines de films être tournés. Comiques burlesques, drames, adaptations romanesques, documentaires, actualités, tous les thèmes furent abordés. Pathé fut ensuite rejoint par Gaumont à Joinville, puis par la Paramount à Saint-Maurice.
À la production de films s’ajouta rapidement la fabrication de pellicule, dans la massive usine de la rue des Vignerons à Vincennes et dans l’usine des bords de Marne à Joinville-le-Pont, qui nourrit non seulement la production cinématographique mais également les premiers formats accessibles à tous : Pathéorama et surtout Pathé-Baby.
Le cinéma est le théâtre, l'école et le journal de demain.
Charles Pathé, 1901
En Musique
Enfin, bien que la branche musique des Etablissements Pathé ait été implantée à Chatou, les industries du son marquèrent également le territoire de leur présence. En 1896, les Pianos Gaveau construisirent à Fontenay-sous-Bois une usine de 14 000 m2. Jusqu’à 450 ouvriers et ouvrières, pour certains logés dans la cité ouvrière voisine, y produisaient jusqu’à 3 000 pianos pas an.
L'Histoire continue
Bien que les acteurs aient changé, le fil de l'histoire continue.
Si la Société française de production (SFP), dernière occupante des studios de Joinville dont sortit jusqu’à 40% de la production cinématographique française, les a quitté en 1987, c’est pour s’établir à Bry-sur-Marne. Les Studios de Bry sont promis à un développement important après leur labellisation en tant que « grande fabrique de l’image ».
Ayant reçu le même label, l’Institut National de l’Audiovisuel (INA) s’est lui aussi installé à Bry-sur-Marne dès 1975. Il contribue à la fois à la préservation du patrimoine audiovisuel français et à la formation des futurs professionnels du secteur par son école INA campus en pleine expansion.
Par ailleurs, le territoire abrite plusieurs studios d’enregistrement, comme celui de Saint-Maurice, géré par Paris Est Marne & Bois.